03/02/2018

Small Talk, la pièce



Le small talk recouvre en anglais cet échange des petits riens, ces aimables amorces qui mettent le feu à la conversation. Certains ont le small talk facile mais pas Justine, l’héroïne de Carole Fréchette. Elle n’est pas timide, mais, en un mot comme en cent, elle ne sait pas broder.
Or la société s’accommode mal du silence et de la pause. La société du spectacle glose sur tout : on s’épand à la télé, on débat dans les colloques, on prend la parole en politique, on déblatère sur le zinc, on twitte, on poste, on commente. Si l’on regarde de plus près, il n’y a peut-être plus qu’au théâtre que le silence puisse paradoxalement être encore entendu.
L’auteure confie avoir mis dans la jeune fille beaucoup d’elle. Justine est l’antihéros de la société du commerce et de la joie, une taiseuse qui crie sa difficulté d’être au monde. Un lot humain bien mieux partagé qu’on ne croit.
Dans ce montage dramatique au rythme cinématographique, on croisera Justine et sa mère aphasique, un père taciturne, un frère présentateur de télé logorrhéique, une belle sœur particulièrement extravertie, une chorale foutraque, une pléthore de pipelettes, ainsi qu'un homme blessé que le destin mettra sur la route de la jeune fille...
Tout et chacun y apparaît irrémédiablement solitaire. Car c’est de solitude dont cette pièce parle mais elle l’aborde sous la forme du paradoxe. Comment est-il possible d’être seul dans une société où l’on peut se connecter à de multiples réseaux, appartenir à des groupes et exposer sa vie dans des shows de télé-réalité.
Mais l’originalité de la pièce de Carole Fréchette ne réside pas simplement dans la description réussie d’une société malade de ses liens ; elle montre aussi comment ces difficultés se répercutent au sein même de la famille et des relations que ses membres entretiennent entre eux dans une écriture théâtrale où se mêlent drame et rire, désespoir et humour, amour et haine et où l'émotion est constamment présente. 

      Carole Fréchette parle de "Small Talk"

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