En France, on retiendra, entre autres, l'adaptation de
Stephan Meldegg dont la pièce fut jouée au Théâtre de Paris du 8
oct 2009 au 5 janv 2010. C'est Michel Leeb qui reprend le rôle du
juré n° 8, l' architecte qui s'interroge sur la culpabilité du
jeune garçon et finit par semer le doute dans l'esprit des autres.
Comme dans le célèbre long-métragede 1957, Attica Guedj et Stephan Meldegg, les metteurs en scène,
ont choisi de réunir les douze hommes dans un espace unique, une
vaste pièce isolée du tribunal comportant une longue table
rectangulaire, des chaises, des toilettes, un vieux lavabo et une
fontaine. Et pratiquement en temps réel : deux heures de
délibérations, de colères, de tentatives de compréhension,
d'échanges souvent vifs pendant qu'un orage éclate à l'extérieur.
D'une modernité universelle, la pièce est à la fois une réflexion sur la vérité
et la justice et un plaidoyer contre la peine de mort. Elle révèle
les contradictions des uns et des autres, leurs frustrations, leurs
rancœurs, mais également leur humanité. Témoin forcément muet,
le public se retrouve pris comme dans un étau dans un huis clos
étouffant et haletant, bien qu'on en connaisse le dénouement.
«La pièce, inspirée de l’expérience
propre à l’auteur, démontre magistralement que les prises de
positions de douze jurés peuvent être faites moins de réflexions
sincères et perspicaces que de préjugés personnels, devenant alors
un plaidoyer passionné pour une justice impartiale qui exclut la
peine de mort. Au cours de cette délibération, un seul homme, le
huitième juré - interprété par Michel Leeb - s’élève contre
une unanimité de confort, trop rapide, qui serait fatale à
l’accusé. A lui, le rôle difficile de soulever les questions, de
provoquer la discussion, au risque d’exaspérer ses onze collègues
d’un soir. Leur confrontation peut changer le cours de la vie d’un
jeune homme, mais aussi la leur, à ces douze individualités si
tranchées, si différentes les unes des autres, chacune plongée,
jusqu’à ce soir, dans son monde étanche. Non, ces hommes ne
seront plus jamais les mêmes, après cette soirée. En se penchant
sur le sort d’un de leurs semblables, ils auront affronté leurs
propres démons, leurs propres faiblesses. Il m’a paru impératif
de retraduire, avec Attica Guedj Douze Hommes en Colère, car le
texte français d'André Obey datant des années 50 semblait plus
daté et plus littéraire que le langage de la pièce de Rose. En
effet, les dialogues de Reginald Rose ressemblent au verbe de
l’Américain moyen d'aujourd’hui : direct, brutal, souvent
grossier ! Nous avons donc cherché à définir un langage propre à
chaque personnage, en fonction de sa classe sociale, son métier, son
passé, sa psychologie. Douze Hommes en Colère, fait référence au
théâtre populaire dans le meilleur sens du terme. C’est avant
tout une pièce qui fait appel à l’intelligence et à la finesse
du spectateur, en s’adressant d’abord à son cœur et à ses
sens. Les douze personnalités très différentes réunies dans ce
huis clos pour rendre leur sentence, campent le parfait reflet du
paysage social de notre société actuelle. Pendant ces heures de
délibération s’installe une quête de vérité, où s’exerce le
sens des responsabilités de chacun. L’intensité du débat soulève
de nombreuses questions dont celle de donner la vie ou la mort. C’est
à cette réflexion essentielle que s’attache avec émotion et sens
critique le juré n°8, interprété par Michel Leeb. La mise en
scène choisie a l’ambition de donner une épaisseur humaine à ce
débat sur la justice. Les comédiens réunis autour de Michel Leeb
puisent en eux une vérité en écho avec l’extrême tension de la
situation. Les sentiments des personnages les uns envers les autres :
sympathie, méfiance, attention, hostilité, voire haine déclarée,
inspirent leurs jeux dépourvus d’artifice ; passion brutale chez
certains, humour tapageur chez d’autres. Mais exister au sein du
groupe par l’écoute autant que par la parole, est la priorité de
tous.»
Stephan Meldegg
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